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L’urbanisme primaire à la mode RPB de Mme Malgorn

Urbanisme Primaire RPBEn plus d’être rempli de blagues usées et de quizz populistes (lire ici), le premier tract « Sciage » édité par le groupe Rassemblement Pour Brest (RPB) de Mme Malgorn est truffé de contrevérités. S’agissant de ma délégation, voici un petit décryptage de leur article : « l’urbanisme à la mode socialiste ».

Première erreur, le lien qu’ils font entre la démographie, les zones d’urbanisation et la population des quartiers. Comme je l’ai déjà montré dans deux notes « les dessous de la politique de l’urbanisme » et « quand les petits chiffres cachent les grands », la corrélation simpliste qui est faite est fausse. La baisse de la population brestoise est corrélée au manque d’offre de logements. Il est donc faux de dire qu’il ne faut pas construire de nouveaux logements parce que la population diminue. Le nombre de personnes par logement (par ménage) baisse continuellement depuis 40 ans, si nous ne proposons pas de nouveaux logements, la population baisse mécaniquement. Les nouvelles zones d’urbanisation (ZAC) tant critiquées sont justement là pour apporter une part de cette nouvelle offre sur les 10 ou 15 prochaines années et ainsi maintenir notre population sur le territoire de la métropole.

Pour bien appuyer leur démonstration, RPB lâche le chiffre de 25 hectares ouvert à l’urbanisation sur Brest, comme s’il s’agissait là d’un bétonnage massif. Il s’agit de ZAC qui vont s’étaler sur les dix prochaines années. Ce chiffre sur 10 ans représente la création de moins de 65 logements par an (25 ha / 10 ans x densité de 25 log/ha). Sur environs 75 000 logement que compte la ville de Brest, cela représente une croissance inférieure à 0.01% par an … de quoi déséquilibrer tout l’équilibre urbain, c’est sûr !!

Notons au passage que les quatre communes de droite de la métropole ne semblent pas s’opposer aux extensions urbaines. Bien au contraire, elles sollicitent la métropole pour sortir le plus rapidement leurs propres zones d’urbanisation. Comprenant parfaitement l’enjeu qui se pose, elles sont pro-actives sur le sujet et planifient à 10 ou 20 ans aussi. On n’entend rarement RPB sur le sujet. Etonnant pour des conseillers métropolitains aussi engagés sur ce thème, non ?! Les nouvelles zones d’urbanisation auraient-elles une couleur politique qui les rendrait plus pertinentes quand elles ne se font pas dans des communes de la gauche plurielle ?

Fort d’un discours (peu convainquant) condamnant la création de nouveaux quartiers, RPB pointe un manque de travail sur la réhabilitation du cœur de la cité en s’appuyant sur notre observatoire de l’habitat. Brest métropole est une collectivité très en pointe sur l’habitat et l’ancienneté de son observatoire que nous envient de nombreuses villes en est un premier témoignage. Ce discours méconnait tout le volet sur le renouvellement urbain que nous menons depuis de nombreuses années et qui se poursuit aujourd’hui, sur Recouvrance, Bellevue, le haut de Jaurès et Kérinou, par les OPAH-RU et l’ANRU. C’est aussi passer bien vite sur Tinergie, une des premières plateformes de rénovation thermique de France. Aujourd’hui, Tinergie garde son avance en s'attaquant aux copropriétés, grâce à une enveloppe de financements issue de l’appel à projet « Ville de demain » qui permettra de disposer d’un montant d’aides pour les habitants de 5 millions d’euro sur 2 ans. En effet, tout cela n’est rien !

RPB revient aussi avec son slogan simpliste : 6000 logements vacants, pourquoi en construire d’autres alors ? Ce questionnement étant bien réel, nous avons demandé à l’ADEUPA de mener une étude détaillée sur le sujet (dont on peut retrouver la synthèse publiée en avril ici). Suite à leur questionnement, nous avons partagé ces conclusions avec eux lors d’une commission plénière présentant ce rapport. Ces conclusions témoignent d’une bien autre réalité ! Loin des 6 000, ce sont 2 500 logements qui affichent une vacance de plus de 2 ans, soit 2.3% du parc de la métropole, ce qui est très comparable avec ce qui se voit dans les autres agglomérations de même taille. Cette vacance est majoritairement le fait de propriétaires individuels. Elle est en lien avec une dégradation importante des logements. Sans investissement volontaire de leur propriétaire, ce stock ne représente pas une opportunité en capacité de logements. On s’étonnera donc que RPB en soit resté à ses 6000 logements vacants qui n’existent plus … que dans leur imagination.

RPB se pose ensuite en défenseur de l’environnement : « On se gargarise de plans comme l’agenda 21, le plan climat territorial, on prêche l’écologie mais on poursuit un étalement urbain au détriment de zones sensibles. » Là, RPB prêche surtout une ignorance peu pardonnable tant le sujet a été traité dans la révision du SCOT en cours et présenté à de nombreuses réunions. La réalité du développement urbain des dernières années sur le pays de Brest s’est réalisé justement en dehors des centralités urbaines et s’est donc fait justement au détriment des zones sensibles, mais aussi des espaces agricoles (source d’emplois). Une urbanisation éparpillée, avec une densité faible (proche de 5 logements/ha), là où la métropole s’est fixé l’objectif de 25 log/ha. C’est donc bien pour lutter contre cette réalité que l’ensemble des communes du pays de Brest (loin d’être malheureusement toutes à gauche !) partagent aujourd’hui avec nous cette nécessité renforcer des centralités à partir d’extensions urbaines plus denses, mais aussi bien-sur, du renouvellement urbain. (Cf. diagnostic du SCOT ici et notamment celui sur la démographie )

Produire un nouveau quartier à 25 log/ha, c’est sauver des espaces sensibles et des terres agricoles, car cela évite une urbanisation diffuse beaucoup plus consommatrice d'espace, entre 5 et 15 log/ha.

Enfin, RPB se contredit en quatre lignes : s’opposer aux Capucins et à son téléphérique, puis écrire plus bas vouloir privilégier le renouvellement urbain. Qu’est ce donc que la reconversion de friches libérée par la marine, en hyper-centre ? C’est bien évidemment du renouvellement urbain !

Voilà une belle page d’un « urbanisme à la mode RPB » qui fait fi des réalités et ressasse un déclinisme maladif qui fait finalement beaucoup de mal à Brest. Si tout cela n’était qu’un jeu de politique politicienne, cela ne serait pas très grave et ce serait de bonne guerre. Mais l’urbanisme comme l’économie n’est pas un sujet anodin, il engage lourdement le développement de notre agglomération et son dynamisme. RPB semble feindre d’ignorer que les mécanismes en jeux sont loin d’être du seul fait de l’argent public, mais repose largement sur la volonté d’investisseurs qui choisissent de placer (ou pas) leur argent à la pointe de la Bretagne.

Continuons à prêcher le déclinisme comme le fait Mme Malgorn et il arrivera. En matière économique, les prophéties autoréalisatrices existent bien. Ce tract porte finalement bien son nom, il se donne juste l’ambition de scier la branche sur laquelle nous vivons.

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