Previous month:
juillet 2017
Next month:
octobre 2017

septembre 2017

Quelques explications pour un Conseil

Hier, avec quelques camarades ayant des responsabilités au Parti socialiste, nous avons pris l’initiative d’inviter les membres de notre Conseil fédéral à se réunir lundi soir prochain, lors d’un Conseil fédéral extraordinaire. Cette initiative qui relève normalement de notre Premier secrétaire ne manquera pas de susciter quelques questions, voire l’accusation de prise de pouvoir par la force. Il n’en est rien. Mais quelques explications s’imposent.

Tout d’abord, il faut couper cours à toute volonté de prise de pouvoir. Pour ma part, je ne suis candidat à rien en dehors des responsabilités que j’ai déjà au Parti. Je crois les autres signataires de cet appel sont dans le même état d’esprit. L’interpellation que nous faisons est une question de méthode avant d’être une question de personne.

La motivation de cette invitation est clairement une réponse aux demandes formulées par nos camarades militants de pouvoir se réunir et échanger sur une échéance importante qui est l’élection d’un nouveau Premier secrétaire pour notre fédération. En tant que responsables, nous partageons aussi cette attente et ce besoin de discussion, de dialogue entre nous, avant de relancer des échéances électorales. Tout cela est assez logique dans un parti, discuter, débattre, converger, cela prend du temps, mais c’est un temps nécessaire qui permet ensuite que cela se passe mieux.

Mais c’est la forme de notre action qui risque d’être critiquée. Puisque qu’il y a désaccord de méthode, c’est bien la méthode qu’il faut interroger.

Lorsqu’il y a désaccord et difficulté à converger, je crois qu’il faut toujours s’en remettre aux fondements qui font sens dans toute organisation. En l’occurrence, dans un parti comme dans une association, il s’agit des statuts. Ils sont écrits à des moments où la tension est moindre. Ils ne manquent pas d’être longuement discutés lors des congrès. Ils rappellent le cadre de notre action et de nos fonctionnements. Allons donc voir ce que disent nos statuts, qu’ils soient nationaux ou fédéraux d’ailleurs.

Les deux premiers principes fondamentaux que l’on va y retrouver et qui font écho à la situation d’aujourd’hui sont les principes de la liberté d’expression des militants et aussi de la loyauté au parti. Un parti est avant tout un lieu d’expression, il est normal que chaque adhérents ait la possibilité de s’exprimer, puisse faire entendre et partager son avis. Nos instances sont là pour cela. Il ne s’agit pas de les réunir quand il n’y a rien à dire et de ne pas le faire lors d’événements importants et structurants. Par ailleurs, il est bon de rappeler que notre parti pose clairement la non-appartenance à d’autres partis ou mouvements politiques. Dans cette période un peu confuse, il est bon de le rappeler. Chacun est libre de rester ou de partir, mais il doit exister une forme de loyauté qui est le socle de la confiance entre nous, minimum essentiel au travail ensemble. Pour discuter avec intelligence de sujets complexes et souvent avec de nombreuses divergences, il faut un cadre apaisé où les personnes se respectent et font preuve de bienveillance. Quand on est dans un parti, on réfléchit et travaille dans le parti auquel on appartient, pas pour celui d’à coté. Que mon propos ne soit pas interprété comme du sectarisme primaire, c’est exactement pareil dans une équipe de foot ! Dans les activités qui se ponctuent par des compétitions, qu’elles soient sportives ou électives, le jeu d’équipe veut que l’on respecte certaines règles. Cela ne nuit ni à la qualité de l’équipe, ni au jeu de celle-ci, bien au contraire.

Sur notre fonctionnement en fédérations, le principe statutaire important est la primauté du Conseil dans la direction du parti au niveau départemental. C’est le Conseil fédéral qui assure la direction du parti. Entre deux réunions du Conseil, c’est le bureau Fédéral qui gère les urgences dans la direction du parti. Ces deux instances de direction sont présidées par un Premier secrétaire. Ces deux instances ont le pouvoir de direction car elles sont des émanations démocratiques des résultats du congrès précédents. Les rapports de force entre courants de pensée y sont représentés à l’image du vote des militants. Par contre, le Secrétariat fédéral (que l’on confond souvent avec le Bureau) est quant à lui établit sur une liste proposée par le Premier secrétaire. Il correspond à ce que l’on appelle l’exécutif de la fédération : il exécute les décisions prises par le Conseil ou le Bureau. Il n’a de pouvoir autre que celui qui lui est délégué par le Conseil.

Dans le cas d’école qui nous concerne aujourd’hui, la démission du premier secrétaire, comme les modalités d’élection d’un nouveau secrétaire ont été décidées à huis-clos en Secrétariat fédéral. Les membres du Conseil, comme les militants, ont découvert dans la presse la démission, la date très proche de fin de dépôt des candidatures et celle de l’élection, sans parler d’un déjà potentiel nom pour la succession. Ce n’est pas banal ! Si nous étions dans un comité d’entreprise, nous nommerions cela un « délit d’entrave ».

Ce que disent les statuts est très clair. En cas de vacance du poste de Premier secrétaire, ce qui sera le cas fin septembre d’après le courrier reçu de notre Premier secrétaire en place, il faut élire un successeur dans un délai de trois mois. On voit donc mal l’intérêt d’un empressement. Statutairement, il existe déjà une collégialité élargie pour la direction : le Conseil fédéral et une collégialité resserrée : le Bureau fédéral.

Pour finir, malgré de nombreuses relances, la demande répétée de plusieurs camarades de mise en place d’un Conseil fédéral avant l’élection est restée lettre morte auprès du Premier secrétaire actuel. De nombreux articles ont fuité dans la presse, donnant une image désolante du fonctionnement de notre parti. L’absence de l’ouverture d’une instance de débat en est la principale cause. Il nous a semblé nécessaire de prendre les devants et d’y remédier.

En la matière, nos statuts ne donnent pas la prérogative unique au Premier fédéral pour convoquer un Conseil fédéral. Rien ne vient contredire le fait que plusieurs membres puissent organiser la mise en place d’un Conseil, pour peu qu’il y ait un ordre du jour. C’est ce que nous avons fait et rien de plus. Libre maintenant aux membres du Conseil de prendre acte de la démission du Premier fédéral, puis de partager pour définir ensemble la direction que nous souhaitons pour notre parti en matière de réélection d’un premier fédéral. Je ne doute pas qu’il y aura des débats, mais c’est bien ce qui fait la richesse de notre parti.

Voilà, j’ai pour habitude d’expliquer les choix que je fais et ce qui me conduit à les faire. Ce texte n’engage que moi et chacun des autres signataires est libre de s’en affranchir. Mais loin des caricatures qui ne manqueront pas d’être faites, je souhaitais que le sens de cette démarche soit celui qui fasse débat, s’il y a.

Ci-dessous l’analyse mise dans l'invitation en Conseil fédéral extraordinaire sur l’analyse des statuts, et qui reprend plus formellement ce qui est au-dessus.

Lire la suite "Quelques explications pour un Conseil" »


Sept nuances de gauches

170724_Dessin 7 nuances de gauchesSuite aux dernières élections, il devient complexe de comprendre la gauche ou plus exactement, les gauches. Il est cependant possible de définir une grille de lecture sur ce qui fonde ces gauches aujourd’hui. Cette grille de lecture peut aussi donner un axe de réflexion sur la place du parti socialiste dans cette nouvelle géographie.

Jean-Baptiste de Foucauld apporte une première clé de lecture sur les moteurs de la gauche : « les trois cultures politiques qui permettent le développement humain : la résistance, la régulation et l’utopie. »

LES TROIS CULTURES POLITIQUES HISTORIQUES DE LA GAUCHE

Ces trois cultures ont structurés la gauche depuis fort longtemps. Elles se retrouvent d’ailleurs assez lisiblement lors des motions de nos congrès. La culture de la résistance est la culture historique de la gauche. Fondée sur les luttes, le syndicalisme, la gauche de combat, elle est celle dans laquelle se retrouve encore « la gauche de la gauche » et dans laquelle le mouvement des frondeurs puise ses racines et sa légitimité. La culture de la régulation est celle de la gauche au pouvoir. Une gauche qui négocie, qui adapte, qui arbitre. C’est la gauche des compromis, mais c’est aussi la gauche qui travaille le réel. La culture de l’utopie est ancienne à gauche, ainsi parle-t-on du « socialisme utopique » au début du XIXème. C’est la culture de l’imaginaire attendu, de l’idéal, mais aussi des visons réformatrices profondes de la société. Ces dernières années, elle a plutôt été soutenue par les mouvements écologistes de la gauche, mais aussi par des mouvements s’affirmant comme tels, à l’image d’Utopia.

Ces trois cultures se conjuguent et s’associent plus ou moins en fonction des sujets et des personnalités. Ce mélange des gauches est parfaitement exprimé par la citation bien connue de Jean Jaurès : « Le courage, c’est d’aller de l’idéal et de comprendre le réel. » Plus récemment, la dimension utopique de l’écologie est ainsi passée dans les deux autres cultures avec plus ou moins de succès. Bien intégrée dans les éléments de langage, l’écologie fut malgré tout relayée au second plan dans les pratiques réelles. En France, l’existence d’une « écologie politique » ayant préempté le sujet dès le départ a probablement un lien avec l’appropriation plus lente des autres partis.

Ces trois axes permettent de comprendre les trois couleurs primaires de la gauche ainsi que les compositions qui en découlent. Cependant, ce prisme semble avoir explosé lors de la dernière séquence électorale. Il n’en est rien. Mais pour comprendre, il faut amener une nouvelle dimension à cette lecture de la gauche, celle du modèle de gouvernance.

Lire la suite "Sept nuances de gauches" »