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20 ans de syndicalisme !

2017-11-27_22h00_38Le 25 novembre 1997, je fus élu pour la première fois comme élu titulaire au CE. J’étais alors le seul élu de mon syndicat de l’entreprise, le SNEPIE. Vingt années ont passée et j’ai beaucoup appris grâce au syndicalisme. Il y a 12 ans, je suis devenu Délégué syndical central (DSC) alors que l’entreprise engageait un plan social. Puis, pour la 4ème fois l’année passée, j’ai été élu Secrétaire de mon CE.

Le syndicalisme et la politique sont deux mondes séparés et c’est mieux ainsi. Bien que pratiquant les deux en même temps depuis le début, j’ai toujours fait attention à ne jamais mélanger ces deux fonctions qui agissent dans des sphères d’influences différentes. Pour autant, j’ai toujours considéré que le syndicalisme était une forme de « politique appliquée » au monde de l’entreprise. Comme la société, l’entreprise est un lieu où se jouent des relations individuelles, avec des règles particulières et une économie globale. Après toutes ces années, je peux assurer que le syndicalisme est assurément une très bonne école de la politique !

Une des premières choses que j’ai apprise en faisant du syndicalisme, c’est l’effort de compréhension globale de l’entreprise, de ses acteurs, de ses enjeux, des interactions entre personnes, services ou au sein de la chaîne hiérarchique. Il n’y a pas un regard, mais des regards. Il n’y a pas un enjeu, mais des enjeux croisés, emboîtés les uns dans les autres, parfois cohérents, mais aussi souvent contradictoires. Il faut arriver à comprendre, souvent à décrypter ce qui ne se dit pas directement, puis tenter de s’en donner une vision globale.

En politique, on retrouve aussi cela, mais à une échelle beaucoup plus large encore. Une échelle tellement large que nul n’est capable de l’appréhender dans sa totalité. Il n’y a donc pas de « Vérité », juste diverses croyances au regard de visons différentes de l’intérêt général, souvent d’ailleurs orientées par le point de vue à partir duquel les personnes regardent.

La seconde chose que j’ai apprise est l’écoute des personnes, des salariés. Cela peut être simplement des discussions informelles qui permettent de saisir ce qui se passe dans un service. Mais cela peut aussi être un salarié qu’il faut défendre, dans des situations où le syndicaliste se transforme en avocat face à la Direction, comme dans des entretiens de licenciement par exemple. L’écoute, la compréhension et l’empathie sont à la base de la réussite des actions que l’on entreprend et il peut y avoir des enjeux forts. C’est cette écoute des différences, des divergences qui permet aussi d’élargir son spectre dans la compréhension des enjeux et des mécanismes sociaux. C’est aussi de cette écoute que l’on puise sa représentativité réelle.

En politique, c’est pareil. Les hommes politiques sont au service de l’intérêt général et celui-ci n’existe qu’au travers de l’écoute et de la compréhension des diverses attentes des citoyens. Certains politiques pensent détenir des solutions, ils s’écoutent plus qu’ils n’écoutent. C’est pourtant la base d’une politique réussie, au service des citoyens.

La troisième chose que j’ai apprise est le fait de rendre compte, tout en produisant aussi sa propre valeur ajoutée. Il s’agit de faire travailler son esprit pour trouver les liens, les éléments de compréhension et rendre lisible l’entreprise pour les salariés. C’est aussi par le syndicalisme que j’ai pris plaisir à écrire (moi, le mauvais élève en français à l’école !) Afficher ses premiers tracts dans des panneaux syndicaux, aux yeux de tous, c’est exigeant, c’est engageant, mais c’est aussi source de beaucoup de satisfaction.

Ce versant existe probablement moins aussi simplement et directement en politique (ce blog est justement là pour compenser ce manque). La communication est rendue plus complexe par les jeux de multiples acteurs. Mais je garde la conviction que cette exigence de rendre compte est une contrepartie normale au pouvoir qui est donné le temps d’un mandat. Ce feed-back aux citoyens est d’autant plus utile qu’il nourrit la démocratie par une meilleure compréhension de ce qui est fait et pour quelles raisons c’est fait.

La dernière chose que j’ai apprise avec le syndicaliste (et je trouve que ce n’est pas la moindre) est le fait d’arriver à faire bouger les lignes, sans avoir le pouvoir. Le syndicaliste n’a pas le pouvoir, c’est la Direction qui l’a. Historiquement, le syndicalisme est un contre-pouvoir dans l’entreprise, une fonction de résistance face à la Direction qui dirige l’entreprise. Mais la résistance trouve sa limite dans sa capacité à proposer et à changer les choses dans le bon sens, en attendant tout du « patron ». Si l’on veut faire évoluer, transformer, il serait faux de croire que ce n’est qu’au travers d’un rapport de force que l’on obtient ce que l’on veut. Les rapports de force existent bien-sûr et ils sont même nécessaires pour enclencher une prise de conscience, mais ce n’est jamais par eux que l’on gagne vraiment. Dans une entreprise qui fonctionne correctement en matière de dialogue social, l’affrontement direct conduit à une dégradation de la situation. Pour avancer, Il faut convaincre une partie adverse qui possède le pouvoir dans l’entreprise. Il devient alors nécessaire de comprendre la situation de l’autre autant que la sienne, pour aider à trouver des positions de négociation. J’aime à penser que le rôle d’un syndicaliste est de rendre plus intelligent ses dirigeants ! C’est un très bel exercice, difficile et peu visible, parce que la vraie négociation cohabite souvent mal avec les coups d’éclats et les « coups de comm ». Mais quand cela produit des résultats, alors cela devient une source de grande satisfaction aussi.

En politique, une fois élu, on dispose par nature du pouvoir et le pouvoir adore être utilisé. Toutefois, je crois qu’il est bien de se rappeler que ce n’est pas seulement par lui que l’on doit arriver aux objectifs que l’on se pose. Le pouvoir reste nécessaire parce qu’il est la contrepartie de la responsabilité qu’endossent les élus, mais je crois que la façon la plus efficace et la plus durable d’avancer et de faire progresser la société est de ne pas s’en servir, autant que cela est possible. Avec le pouvoir, il faut toujours préférer le verbe au nom ! Décider par consentement sera toujours plus opérationnel que sous l’autorité ou pire, la contrainte d’un pouvoir. Ce n’est pas toujours possible, mais cela doit rester comme un idéal qu’il faut toujours travailler.

La compréhension, l’écoute, le rendre-compte et l’exercice du pouvoir sans l’avoir sont de très bons apprentissages pour pratiquer la politique ! Depuis quelques années, j’ai essayé de creuser une nouvelle question avec le syndicalisme, celle du bien-être en entreprise et par déclinaison, celle que j’appelle « le bon management ». Depuis 2010, je regarde, je lis, je me forme aux méthodes coopératives de management. L’entreprise a beaucoup à gagner de ces nouvelles façons de penser, d’agir ou de communiquer, de ces nouvelles façons de structurer les rapports individuels et collectifs. Si l’on voit des expériences intéressantes réussies dans des entreprises de tailles humaines et avec des dirigeants éclairés, on reste encore assez loin dans les plus grandes unités. Pour cela, il faudra d’importantes transformations dans la structure des grandes entreprises, à commencer par la question des inégalités !

Cette question fait évidemment aussi écho au monde politique et à l’organisation de notre société moderne. Le « bon management » fait résonnance avec le « bon gouvernement », tel qu’ébauché par Pierre Rosanvallon dans son dernier livre du même nom. La société comme l’entreprise a encore une longue route à parcourir dans ce sens et vous ne serez pas surpris de lire que le premier obstacle à franchir sera aussi celui des inégalités !

Vingt ans de syndicalisme, vingt ans au service des salariés et de l'amélioration des conditions de vie dans l'entreprise. C'est une expérience enrichissante, pleine d’apprentissages, de projets et de rencontres. C'est aussi une façon de voir et vivre l'entreprise autrement.

Vingt ans de syndicalisme, c'est une belle aventure !

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