Ordures et Père noël
Dakar, pro ou anti ?

Politique du chiffre

413267973_84a81d5b4f_o Faire évaluer ses ministres par un cabinet d’audit extérieur, pour ensuite leur faire passer des entretiens en fonction d’objectifs chiffrés, c’est une bien triste vision de notre démocratie et du rôle du politique dans la société.

Loin d’être une idée neuve comme le claironnent ceux à l’origine de cette proposition, cette méthode de management est tout simplement celle que nos grandes entreprises proposent à leurs salariés, copiée-collée sur les méthodes anglo-saxonnes. Voilà donc que notre président externalise sa fonction RH, pour mieux gérer ses ministres ! !

Un détournement de la démocratie

Faire entrer des méthodes propres au monde professionnel dans le champs du politique est une erreur à plus d’un titre.

D’abord parce que la fonction politique n’est pas une profession. A copier les méthodes des entreprises, on acte la professionnalisation des hommes politiques et on acte donc que le "citoyen de base" ne peut finalement plus y avoir accès. C’est une entorse sévère à l’idée même de démocratie et de représentativité politique : tout un chacun devrait pouvoir tenir un rôle, en fonction de sa représentativité et non en fonction de ses « notes » ou de ses compétences.

Ensuite, le recourt à un cabinet d’audit externe est aussi un détournement de la démocratie, comme pour acter que finalement, le suffrage universel et l’avis des citoyens n’était pas un outil pertinent pour évaluer le travail du « haut politique ». On a déjà vu que les sondages donnaient l’avis des français avant qu’eux même ne le donnent (qui influence l’autre ?) Maintenant, on va dire aux français comment évaluer le travail de ses gouvernants …

Aussi, parce la réalité de l’évaluation sur des objectifs quantifiés est assez complexe, mais au final, assez décevante dans les entreprises. Souvent, elle fait naitre des processus de contournement sur les critères d’évaluation mis en œuvre. Elle stimule la concurrence brutale entre les parties prenantes : on peut améliorer un objectif en particulier, au détriment de l’ensemble. Et au final, elle ne sert pas à grand-chose dans le cadre d’une évaluation où le rapport individuel prend le dessus. L’intuition de l’évaluateur sur l’évalué est souvent le seul critère qui rentre en ligne de compte.

Enfin, parce que la culture de l’évaluation par objectifs est loin d’être une garantie de bonne gestion : les crashs industriels récents, comme celui d’Airbus, sont là pour en témoigner. Ce n’est pas une méthode de pilotage pertinente, comme on souhaiterait nous le faire croire.

La culture de l’évaluation par objectifs dans les entreprises est souvent une façon de laisser à penser que l’on évalue sur des critères objectifs quelqu’un, quand la réalité repose sur du rapport humain : du subjectif, tout simplement. Mais évidemment, il faut non seulement l’assumer et avoir le courage de le dire. Chercher des alibis par des consultants est une forme de paresse intellectuelle, pour ne pas dire un manque de courage certain.

Il faut tout de même reconnaître un secteur d’activité pour lequel l’évaluation par objectif marche plutôt bien, quand elle est bien faite : c’est le cas des commerciaux à qui la direction donne des objectifs de vente. La question reste donc à se poser : les ministres de Nicolas Sarkozy sont-ils en fait juste les VRP pour SA politique ?

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