L'islam est-elle une menace pour la France ?
lundi 10 janvier 2011
Vendredi dernier, Nicolas Sarkozy faisait ses vœux aux autorités religieuses. Il n’a pas manqué de dire son inquiétude concernant le récent sondage de l’IFOP sur le jugement des français à l’égard de l’islam. Celui-ci conclue sur le fait que 42% d’entre nous considèrent la communauté musulmane en France comme une menace pour leur identité. L’inventeur du Ministère de l’immigration, de l’intégration et l’identité nationale s’est dit préoccupé. Il peut l’être !
On notera aussi le fort clivage entre tendances politiques : ceux qui considèrent la communauté musulmane comme une menace sont 24% du coté du PS, 34% du coté du MoDem, 62% pour l’UMP et cela n’étonnera personne, 98% au FN.
Ce qui interpelle le plus, c’est que plus des deux-tiers des personnes votant à droite aient fini par intégrer que la population musulmane en France était une menace pour leur identité, alors qu’elle représente moins de 10% de la population. On voit encore ici comment la politique de ce gouvernement et de Nicolas Sarkozy s’est servie des faiblesses de notre société pour en produire des éléments de clivage et de rassemblement. C’est évidement un mode d’action politique extrêmement dangereux.
Au-delà de ce sondage pour le moins très inquiétant, on peut aussi se poser la question de la popularité de l’islam dans les quartiers et de sa facilité à y convertir des habitants (ce qui n'est pas une évidence en soi pour une religion dans notre monde moderne).
J’entendais il y a quelques jours un sociologue des religions dire que la capacité de l’islam à recruter reposait sur trois valeurs fortes : l’espérance, la justice et l’estime de soi. On comprend ainsi mieux la force d’un discours (religieux ou pas d’ailleurs) dans des quartiers en difficultés, où les personnes n’ont plus de perspectives, subissent cet état de fait comme une injustice et conséquence des deux premiers points, ont le plus grand mal à construire une estime de soi positive. Face à un discours qui redonnerait une perspective sur ces trois sujets fondamentaux, on imagine assez bien une écoute et une adhésion naturelle forte.
Ce ne serait donc pas d’abord un phénomène culturel qui serait le moteur de l’islam dans nos pays, mais un problème de société. Celui de la ghettoïsation dans des quartiers, celui de la discrimination vis-à-vis de ces populations, celui de la paupérisation de familles pour lesquelles la solidarité nationale ne marche plus.
On ne stigmatise aujourd’hui les musulmans pour leurs différences culturelles que pour mieux oublier qu’ils sont aussi les laissés pour compte de notre république et que nous en portons une large responsabilité.
L’islam n’est pas une menace, c’est juste une religion. Ce qui est une menace dans ce pays, c’est de laisser perdurer l’injustice et l’oublie d’une partie de la population, quand d’autres vivent et consomment largement. L’accroissement des inégalités est LA menace réelle, mais surement pas les différences culturelles ou identitaires qui sont autant de patrimoines et de richesses que nous héritons de l’histoire. Ne nous y trompons pas, car ce sont-là des mécanismes qui ont déjà trop souvent été employés par le passé et qui n’ont conduit qu’à la haine, la violence et aux larmes.