Étude de faisabilité de la rénovation de Francis Le Blé
mardi 16 avril 2024
Il avait été annoncé que la ville de Brest communiquerait dans la presse au mois de mars sur l'étude commanditée pour la rénovation du stade Francis Le Blé. Actons qu'avril, est arrivé et toujours rien. Les glorieux résultats du Stade Brestois (et peut-être aussi une visite impromptue de l’UEFA) semblent avoir détourné nos chers édiles de leurs belles promesses. C'est dommage, il va falloir effectuer le travail nous-mêmes !
Dans une précédente note (ici), j'accusais la municipalité brestoise d'avoir fait faire un rapport sur un coin de table, afin de valider leurs propres conclusions sur l'impossibilité de rénover Le Blé. Mea-culpa, je me suis lourdement trompé ! Le fameux rapport aurait couté quelques 40 000 € aux deniers publics et a été fait très sérieusement par l'Atelier d'architectes urbanistes Lauzeral (AXL) et un Cabinet d'ingénierie sportive et culturelle (ISC).
Je n'aurai pas fait mieux pour une pré-étude de faisabilité de la rénovation de notre emblématique arène.
Un vénérable édifice qui vient de fêter ses 100 ans en 2022, dans un silence honteux, malgré les grands moments vécus dans ce haut lieu du foot brestois, dont certains s’écrivent encore ces derniers jours. Nos élus semblent avoir préféré célébrer la jeunesse des 10 ans de l'Aréna aux 100 ans du stade de l'Armoricaine ! On se demande bien pourquoi ?!
Un rapport public devenu Top Secret
Mais alors, que contient ce fameux rapport qui, d'après nos chers élus, confirme le fait qu'une rénovation de Le Blé n'est pas possible pour des raisons normatives et les contraint donc à engager un projet pharaonique de nouveau stade privé au Froutven, à grand coup de subventions publiques.
Question subsidiaire : pourquoi ce rapport, datant de juin 2023, met-il autant de temps à « passer dans le domaine public » ? Contiendrait-il des données « secret défense » dans ces temps tourmentés ou alors, cacherait-il seulement des éléments pouvant laisser penser qu'une fois encore, de grands responsables nous ont raconté de gros bobards !!
Par chance, quelques élus de la métropole osant porter un regard critique sur le projet de nouveau stade semblent avoir fait fuiter le document de synthèse final. Il y a deux mois, une bonne âme m'a déposé le Précieux (document) dans ma boite aux lettres, sans plus de commentaires. J'attendais patiemment la version commentée par nos élus dans la presse, mais puisqu’elle semble tarder, malgré les écrits de l'adjoint au Sport, je me résous à aider cette collectivité à tenir sa parole en expliquant le contenu de cette étude qui semble plutôt très sérieuse.
Que dit cette étude ?
Le rapport se découpe successivement en quatre parties distinctes.
- Un diagnostic du site qui s’attache à décrire l’emplacement et de ses contraintes règlementaires.
- Un diagnostic architectural et urbain qui part de l’histoire depuis 1922 pour arriver à une description (peu) qualitative du bâtiment existant.
- Un diagnostic de l’existant au regard de la réglementation FFF et de la licence Club qui détaille les limites du stade actuel au regard des contraintes règlementaires posées par la Fédération française de football pour rester en Ligue 1 et en Ligue 2.
- Deux scénarios de rénovation du stade, décrivant techniquement deux projets, en y travaillant plus finement les surfaces, les faisabilités et les coûts globaux.
Un document de synthèse de 72 pages, plutôt complet, bien fait et documenté. Une analyse qui n’est clairement pas une étude de détails, qui aurait couté beaucoup plus cher, mais déjà un beau travail de faisabilité préalable sur les enjeux et des options possibles d’une rénovation de Le Blé.
Reprenons chacune des parties.
- Diagnostic du site -
Cette partie n'est pas sans intérêt, mais elle est surtout sans enjeu. Elle s'attache à regarder la faisabilité d'une rénovation au regard des contraintes urbanistiques actuelles sur les parcelles. Mais les élus ont tout à fait à leur main (à leur vote, très exactement) la définition des contraintes dans un PLUi. Comme dans de nombreux secteurs de projet de la métropole, toutes les contraintes peuvent être modifiées, voire levées aisément. Donc, pour des élus qui maitrisent le PLUi, rien d'impossible de ce côté-là.
Le seul point vraiment intéressant de cette partie est la question des mobilités, afin de desservir le stade. Le rapport rappelle la difficulté de stationnement du secteur qui nécessite en effet une coopération avec le groupe scolaire de l'Estran (lycée privé Charles de Foucauld), ainsi que des aménagements de circulation sur le quartier les soirs de match. Il est à noter que cette difficulté de stationnement de proximité est surtout liée à l'accueil des VIP qui iront ensuite dans les loges ou sur les meilleures places qui leur sont réservées. Dans la réalité, la majorité du « grand public » se gare dans Brest, marche ou prend les transports en commun pour accéder au stade.
L'extrême proximité à Le Blé est un enjeu VIP. C'est peut-être bien pour cela que nos décideurs sont tant préoccupés par cela !
Mentionné aussi dans l'étude, la contrepartie de cet enclavement (par nature) d'un stade urbain est justement la très bonne desserte en moyens de transport en commun, par le tramway, depuis Plouzané, Gouesnou et Guipavas. Mais aussi par un dense maillage de bus passant par la place de Strasbourg [1]. Cette forte disponibilité des transports collectifs en capacité à rabattre les usagers du stade de quasiment toute la surface de Brest en fait un sérieux atout en terme de capacité de stationnement pour le grand public venant de l'extérieur de Brest.
A contrario, le projet du Froutven, avec ses 1500 places de stationnement annoncées et son seul terminus de tramway depuis Plouzané, relève une très grande fragilité d'accessibilité dans une zone où la voiture est reine. Il est plus que probable que les 1 500 places de stationnement du grand stade soient dans les faits très majoritairement réservées aux 4 200 sièges VIP du projet Le Saint, en augmentation de 250 % par rapport à Le Blé aujourd'hui.
En partant d'une hypothèse très optimiste supposant que chaque véhicule ayant accès au parking du nouveau stade soit en moyenne rempli de 4 personnes, cela fait encore 9 000 supporters dont il faudra gérer l'accès au Froutven en dehors du parking du stade. Ce n'est clairement pas le seul terminus de la ligne de tramway qui permettra d'amener et d'évacuer ces personnes.
À aujourd'hui, aucun accord durable ne semble exister avec LEROY MERLIN, IKEA BOULANGER ou DECATHLON pour mutualiser les parkings. Ces grandes marques restent logiquement très attachées à leurs places de stationnement, qui sont destinées à leur consommateurs bien plus qu’aux supporters du SB29.
De plus, la route restera dangereuse à traverser compte tenu d'une absence annoncée de passerelle au-dessus de la voie prolongeant la RN 265. D'après les derniers échos de la métropole, cette passerelle de sécurité serait trop chère dans le budget actuel des aménagements urbains ! Quand la sécurité du grand public passe après l'accès VIP, il faut toujours se poser des questions...
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Cette partie conclut donc à une absence d'enjeu urbanistique pour Le Blé. Dans les faits, elle témoigne plutôt d'une pertinence de la localisation actuelle pour la déserte grand public des 15 000 spectateurs. A l'opposé, le projet des frères Le Saint apparait comme du quasiment « tout voiture », très sous-dimensionné pour les jours de match, avec ses 1 500 places de stationnement. Mais cette comparaison n'est pas traitée dans le document qui n'a pas vocation à faire une analyse comparative.
- Diagnostic architectural et urbain -
Cette partie porte un jugement très sévère sur Le Blé. Mais elle est aussi probablement réaliste sur notre arène centenaire qui a évolué au fil du temps, plus à bout de rapièçages qu'en profitant d'une vision globale et d'une feuille de route cohérente.
Extrait de la synthèse :
« - Une construction du stade au fil de temps et sans vision globale, aujourd’hui sans identité architecturale.
- Un stade en centre-ville dans un environnement urbain très contraint et composite qui nécessite la mobilisation du foncier du lycée Charles de Foucauld.
- Un stade aux façades peu urbaines.
- Un stade peu qualifiant pour les voisins directs.
- Des services au public et des hospitalités en deçà des standards actuels.
- Des tribunes peu confortables en terme de visibilité et d'assise »
Un seul élément apparaît comme un atout dans une période où la logique de ZAN (Zéro artificialisation nette) commence enfin à poindre dans les règlementations nationales sur l'urbanisme : « un stade très compact en terme d’implantation ».
Bien, ne nous le cachons pas, le navire Le Blé a vécu et les dernières modifications n'ont pas été les plus heureuses, car depuis bientôt 25 ans, le principal décideur de la ville a en tête d'abandonner la vieille coque pour s'en faire construire une nouvelle au Froutven [2]. Comme je l'ai déjà expliqué ici, le projet de stade au Froutven est une vieille marotte du maire, François Cuillandre. À force d'avoir honte du vieux stade et de rêver à du neuf, il est clair qu'un patrimoine laissé sans vision et investi a minima finit par ne plus donner envie.
Mais, c'est justement le sens d'une rénovation ambitieuse : redonner ses lettres de noblesse à un des plus vieux édifices de Brest, chargé d'une histoire sportive intense dans le cœur de nombreux Brestois.
Personne ne dirait plus aujourd'hui qu'il aurait mieux valu raser les Ateliers des Capucins pour faire des immeubles ou des bureaux à la place. Pourtant, en 2005, l'idée a bien trotté dans la tête de quelques-uns. Fort heureusement, cette municipalité a su poser une vision, une feuille de route et a tenu le cap. Les Capuçins est aujourd'hui un très beau lieu, et le restera pour de nombreuses années dans le cœur des générations de brestoises et de brestois qui auront grandi, patins au pied, sur la dalle des anciennes machines. En 2005, le maire défendait la rénovation d'un lieu historique de Brest et l'opposition plaidait pour l'abattre. Il semble que 20 ans plus tard, le maire ait basculé dans la mentalité d’une opposition à cette ville pleine d’histoire !
Un peu d'ambition et de vision ne feraient pas de mal…
- Diagnostic réglementaire FFF -
C'était la partie attendue du rapport. En effet, selon nos chers édiles, c'est la principale raison invoquée pour abattre Le Blé.
L'édifice actuel ne pourrait plus être aux normes. La FFF a accepté des dérogations, mais ne les tolérerait plus dans le futur. Il ne serait donc plus possible de rénover la vieille coque actuelle, sous peine de redescendre les ligues, plus vite que nous les avons montés. Vive le nouveau stade qui répondra à toutes les jolies normes de la FFF !
Bien, commençons par noter que le sujet des normes est souvent utilisé en économie pour tuer ses adversaires plus petits et récupérer des marchés qui, pour finir, font payer de plus en plus cher la note aux usagers. Après avoir fait table rase du secteur, sans possibilité de retour en arrière, les heureux promoteurs de normes sont toujours là pour se partager de plus grosses parts du gâteau. Les belles normes portées en étendard cachent bien souvent quelques traquenards, pour le grand public.
Pour que tout le monde ait le même niveau d'information, rappelons qu'il est possible de retrouver toutes les informations réglementaires sous le lien : règlements des terrains et installations sportives et plus spécifiquement sous le document explicatif de 2021. Pour la Licence Club, il est possible de retrouver le Manuel Licence Club 2023-2024, avec des statistiques très instructives par Club de Ligues 1 et 2, qui montrent que le SB29 n'est pas en bas de tableau.
« Qui veut noyer son chien, l'accuse d'avoir la rage », dit un vieux proverbe populaire. Alors allons-y, que dit le diagnostic de cette sérieuse étude ? Francis Le Blé a-t-il bel et bien la rage ?
Classement fédéral FFF
Pour pouvoir accueillir des matchs en Ligue 1 ou 2, un stade doit être classé au niveau T1 de la FFF. Pour Le Blé, le dernier classement semble dater de juin 2021 et serait valable 5 ans.
Le rapport soulève sept non-conformités mineures et seulement deux non-conformités majeures, vis-à-vis de ce classement en niveau T1.
Les deux non-conformités majeures sont :
Art 3-4 : non-conformité majeure sur les zones de sécurité augmentée : largeur insuffisante tribune Foucaud, plein ciel, Quimper et objets publicitaires positionnés dans la zone de sécurité.
Art 6-6-1 : non-conformité majeure : main courante non obstruée.
La première est une règle de sécurité pour les joueurs. Elle définit la taille des espaces, au-delà de l'aire de jeu, qui doivent être de 7 m en arrière de la ligne de but et de 5 m sur le reste du pourtour. A priori, ces espaces sont trop faibles aujourd'hui à Le Blé.
La seconde est aussi une règle de sécurité, mais plutôt vis-à-vis des zones accueillant le public. Les « mains courantes » de Le Blé (barrières d'une hauteur de 1 m à 1,10 m entourant l’air de jeu) ne sont pas aux normes.
On comprend que ces deux règles soient majeures, car elles sont en lien avec la sécurité de l'évènement sportif, soit pour les joueurs, soit pour le public. Mais elles ne sont en aucun cas majeures au regard d'une rénovation. Il suffira juste de les prendre en compte, et les deux projets proposés dans la suite de l'étude répondent aisément à ces deux non-conformités majeures.
Sans rentrer dans les détails des sept non-conformités mineures, en voici la liste donnée par l'étude :
- Largeur insuffisante de la bande de sécurité engazonnée
- Vestiaire visiteur non identique à celui du club résident
- Absence de siège et de casier dans le vestiaire d'arbitre
- Absence de prise en compte des modalités de vestiaires séparés pour arbitres féminins
- Trop faible surface de stationnement pour les équipes et les officiels avec accès direct et protégé aux vestiaires
- Idem pour le stationnement du secteur visiteur
- Enfin, capacité du secteur visiteur totalement indépendant inférieure à 5 %
Majeures comme mineures, chacune de ces non-conformités devrait pouvoir trouver une réponse dans un projet de rénovation. Et même si ce n'était pas le cas, des dérogations de la FFF restent possibles sur les mineures, comme c'est le cas aujourd'hui.
Au bilan, rien de réellement bloquant de ce côté-là.
Licence Club
Au-delà des règles de la FFF dont les seules non-conformités sont listées ci-dessus, il existe aussi la « licence club », attribuée par la Commission licence Club de la FFF, qui attribue des points dont certains concernent le stade.
Le rapport fait son analyse sur la base des données fournies par le Club, en aout 2022. Le label Licence Club avait alors été obtenu avec un total de 7 422 points (soit un honorable 14,8/20). D'après le rapport, il fallait 7 000 sur les 10 000 points pour avoir la licence club (voir ici la règle exacte). Donc pas vraiment de soucis !
Pour faire simple, c'est comme la note sur 20 au Bac. Il faut un minimum de 14/20 pour garder sa licence.
Comme au Bac, ce qui est intéressant, c'est de regarder là où le Club perd ses 2 578 points sur les 10 000 attendus. Alors, allons-y...
- Sur le thème « média », le Club perd 600 points sur 2 150 (note équivalente de 14,42/20).
La majorité de l'écart vient d'une perte de 400 points pour la médiocrité de l'éclairage. Cela étonne un peu l'adjoint aux Finances de Brest que je fus, car, en 2019, j'avais vu passer une très grosse cartouche financière (plusieurs centaines de milliers d'euros) pour refaire l'éclairage existant, alors qu'il datait de quelques années seulement. Les projecteurs prenaient l'eau et risquaient de provoquer un court-circuit. Un black-out brestois, en plein match de Ligue 1, risquait de nous propulser fâcheusement en Une de l'Équipe ! Ce n'était pas du gout du maire et la belle dépense est passée sans vrai débat, lors d’un petit Comité budgétaire restreint.
Il est vrai qu'à Brest, économiser sur l'étanchéité des projecteurs n'est pas forcément l'idée du siècle !
Bon, ce sont des points facilement gagnables et ce n'est pas cela qui exige un nouveau stade. Il conviendrait plutôt de changer d'éclairagistes… et peut-être aussi tous ceux qui veulent faire des économies de bouts de chandelles… qui finissent par nous coûter fort cher.
- Sur le thème « pelouse », le Club perd 530 points sur 1 700 (note équivalente de 13,76/20).
La pelouse perd des points, notamment pour l'absence : d'un système de régulation thermique fonctionnel, d'une bâche de protection, d'un dispositif d'épidémio-surveillance, d'un dispositif d'économie d'eau et d'atténuation du transfert d'effluents vers le milieu naturel.
Bon, là encore, rien qui ne remette en cause un stade. Idem que précédemment, ce sont juste des dépenses à mettre en œuvre.
Face à ses points négatifs perdus, on notera tout de même que la pelouse est de bonne qualité puisqu'elle semble avoir obtenu une bonne note au championnat de France des pelouses ! Sur les points principaux, la pelouse semble tenir la distance malgré ces 530 points perdus.
- Sur le thème « salariés », le Club perd 497 points sur 750 (note équivalente de 13,25/20).
Bon là, cela chute en terme de notation. On perd des points, et pas par la faute à Le Blé. Je me demande bien qui sont les employeurs dans ce Club ?!
Les plus gros postes de perte de points sont l'absence de médecin, l'absence d'une compétence RH et Organisation, un référent supporter pas très bien noté, et enfin un taux de présence aux réunions de la LFP pas très assidu.
Donc là, des points inutilement perdus par ce qui semble être une certaine légèreté de gestion. Peu mieux faire ! Mais rien à voir avec Le Blé.
- Sur le thème « centre de formation », le Club perd 370 points sur 1 000 (note équivalente de 12,6/20).
Notation la plus basse, mais là encore, complètement à la main des dirigeants du Club. Il semble que les moyens mis en place et les critères d'efficacité soient un peu faibles, au vu de la Commission d'évaluation.
Toujours des points perdus inutilement.
- Sur le thème « marketing », le Club perd 400 points sur 1 350 (note équivalente de 14,07/20)
Là encore, un manque d'investissement sur ce critère. Pas de branding uniformisé. Pas de « signature d'accueil » unique pour tout le personnel présent le jour du match. Pas de moyen de paiement diversifié. Pas d'alimentation de secours des écrans géants. Faiblesse de l'application mobile. Manque de dispositifs LED. Etc...
Encore des points qui s'envolent sans que le bâtiment ne soit en cause.
- Sur le thème « infrastructures », le Club perd 425 points sur 1 900 (note équivalente de 15,53/20)
Sur la partie qui concerne vraiment l'édifice (qui est accusé d'avoir la rage), c'est là que la Commission licence Club délivre presque la meilleure note, avec ce 15,5/20 !
Les 425 points perdus sont majoritairement liés au référentiel de sûreté et de sécurité, à l'absence d'un système de garde corps contraignant pour le contrôle des billets, à l'existence d'une tribune tubulaire et à l'absence de couverture de certaines tribunes.
Beaucoup plus honteux, 130 points sont perdus sur l'absence de bilan et de stratégie carbone, la gestion des pluviales et le zéro bouteille plastique. C'est pas fort ! Mais pas très étonnant non plus...
Pour être complet et honnête, il faut mentionner que deux thèmes obtiennent 100 % des points (20/20). Il s'agit de la « qualité du centre d'entrainement » (pour 650 points) et des « critères de bonne gestion financière UEFA » du Club (pour 500 points).
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Au bilan de cette licence Club obtenue sans briller, il existe une large marge par rapport aux incontournables. Il faut acter que la majeure partie des points perdus est de la responsabilité du Club lui-même et sur des thèmes peu en lien avec le stade Francis Le Blé. Il semble que le Club fasse des choix stratégiques dans ses dépenses et perd « volontairement » certains points dont le bénéfice/coût ne lui semble pas optimum. Pourquoi pas. Mais ne mettons pas cela sur le stade.
Pour le reste, les faiblesses liées au à Le Blé semblent tout à fait solutionnables dans le cadre d'une rénovation et même si cela n'est pas possible à 100 %, la réserve de points en capacité à être gagnés facilement n'en fait pas un enjeu majeur pour atteindre les 7 000 points.
Donc, côté licence Club, il n'y a pas non plus d'enjeux en lien avec Francis Le Blé, d'après le rapport et sur la base des données fournies par le Club lui-même en août 2022.
Mais où nos chers édiles et responsables du Stade Brestois ont-ils bien pu aller chercher la conclusion que le stade actuel ne pouvait pas être rénové, comme cela se fait dans de nombreuses autres grandes métropoles ? Voilà la vraie bonne question… Mais surtout, pourquoi veulent-ils le faire croire aux supporters et à la population ? Ce sera l'objet d'une prochaine note.
- Scénarios d’évolutions -
Sur la partie projet d'une potentielle rénovation, un bon gros tiers du rapport y est consacré (28 pages sur 72), mais je vais être plus court.
D’abord parce que c’est plus compliqué et probablement un peu laborieux de parler d’un projet architectural à l'écrit, sans image. Ensuite, parce qu’il s’agit avant tout d’une étude préliminaire de faisabilité qui n’engage pas le potentiel futur du projet de se construire différemment, de façon participative et encore plus optimisée. Enfin, parce que la faisabilité étudiée est nécessairement en lien avec le cahier des charges que les élus de Brest ont fixé et qu'il n'est pas exclu qu'un scénario plus partagé avec les supporters et les riverains obtiennent encore de meilleurs résultats.
Donc, je prends cette étude pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un regard chiffré sur le champ des possibles et non un projet abouti.
Une rénovation de Le Blé faisable, pour 60 millions d’euros
Sans surprise, puisque cela se fait dans de nombreuses autres villes en France et dans le monde, l'étude conclut à la faisabilité d’un projet sur la parcelle actuelle. Deux versions alternatives sont proposées pour une future rénovation (il en existe bien d'autres). Deux options travaillées en faisant varier certains paramètres comme la capacité d’accueil du public au regard de la taille des espaces réceptifs ou VIP, ou encore, les possibilités de libération de foncier à moyen terme, ainsi que des scénarios de travaux.
Notons que les deux scénarios remplacent les tribunes tubulaires par des tribunes en dur, répondant ainsi au plus gros reproche de l'UEFA, pour l'accès aux compétitions européennes.
Je ne rentre donc pas dans les détails, mais le rapport se conclut en page 69 par : « Ces premiers éléments d'études confirmeraient la faisabilité d’avoir un équipement conforme aux exigences du football professionnel. » Donc, comme nous l'avons vu plus haut, le projet de rénovation du stade Francis Le Blé est possible en terme de conformité règlementaire. Il s'agit avant tout de remettre du qualitatif et du fonctionnel dans le patchwork qu’est devenue l'enceinte au fil des 30 dernières années.
En synthèse, deux scénarios de projets possibles pour des capacités d’accueil plus qualitatives, mais un peu en retrait par rapport à l’arène actuelle qui permet d’accueillir 15 700 spectateurs. Les deux projets sont autour de 14 200 places (-10 %). Le projet du Froutven est aujourd’hui à 15 000 places (-5 %), mais rappelons que le premier projet des frères Le Saint visait une jauge de 13 000 places (-18 %) et que le mini exigé par l’UEFA pour accueillir des matchs de coupe d’Europe est bien plus bas, à 8 000 places (-50 %).
Sur le plan des coûts, les deux scénarios proposés ne parlent pas tout à fait de la même chose, puisque le moins cher reporte dans le temps la rénovation de la tribune plein ciel, pour profiter de l’opportunité d’une mutation à moyen-long terme du foncier qui l’entoure.
Le projet le moins cher est évalué à 50 millions d’euros HT et le plus cher à 60 millions d’euros HT. Je pense donc que pour être honnête financièrement, il faut compter une rénovation complète à 60 M€. L’autre scénario reporte dans le temps un effort financier de rénovation, mais finira bien par couter environ le même investissement.
Cette estimation du cout à 60 M€ inclut l’ensemble des postes : la démolition, les études, la maitrise d'œuvre, la rénovation des bâtiments, les équipements, les mobiliers et les aménagements autour du stade.
Le projet de rénovation reste donc deux fois moins cher que le cout prévisionnel du stade proposé par les frères Le Saint au Froutven, à périmètre identique, c’est-à-dire en y incluant ceux du foncier et de l’aménagement du site, aux frais des contribuables de la métropole.
Que conclure de ce rapport ?
Soixante millions d'euros, ce n’est pas un écart que se balaie du revers de la main, sous l’argument de nos édiles, qui apparaît aujourd'hui fallacieux au regard de cette analyse, que de belles normes nous y obligeraient.
Voilà en résumé le contenu de ce rapport. J'espère qu’il sera rendu public rapidement par le maire de Brest qui semble jouer la montre sur ce rapport livré depuis 9 mois déjà. Il n’y a aucune raison de le garder Top Secret, si ce n'est de vouloir faire perdurer les contre-vérités qui circulent sur l’infaisabilité d’une rénovation et donc l'absolue nécessité de tuer Francis Le Blé au profit d’ArkéaPark. Un projet très très privé au Froutven, qui s'apprète à déposer son Permis de construire.
Le choix récent de financer très fortement par de l’argent public un nouveau stade deux fois plus cher au Froutven et mis en gestion privée est un choix purement politique de cette collectivité. Je reviendrais dessus dans une prochaine note, non sans avoir regardé les gros enjeux financiers avant.
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[1] Le stade Francis Le Blé est directement desservi par le réseau de transports urbains Bibus. Les lignes de bus 19 et 17 desservent directement le stade. Ce service est complété en rejoignant les arrêts place de Strasbourg desservis par 3 autres lignes de bus (14, 15 et 16), ainsi que la ligne de tram A, et permettant l’accès à deux lignes du réseau BREIZHGO (32 et 33) ainsi qu’aux parkings relais vélo et auto.
[2] Nous le voyons aujourd’hui avec le passage de la commission de l’UEFA, les choix court-termismes successifs de tribunes tubulaires sont le principal reproche indépassable de l’enceinte au regard de normes continentale (Coupe d’Europe). La jauge à 15 000 places est très au-dessus des 8 000 exigés. Mais c’est la qualité des places qui prime sur la quantité, dans l'évaluation de l'UEFA.